Enfant victime de harcèlement – quels effets psychologiques et comment soigner ?

La lutte contre le harcèlement a été érigée comme cause nationale le 6 février 2015, par la ministre de l’éducation nationale, qui a annoncé un ensemble de mesures pour lutter contre ce phénomène qui ne cesse de prendre de l’ampleur, au sein de l’école et sur les réseaux sociaux.

L’école est un lieu où l’enfant doit se sentir protégé. Mais dramatiquement, il devient le lieu le plus exposé, le plus insécurisant pour certains enfants car il n’est pas sous la protection de ses parents. Il se sent menacé dans son environnement quotidien et ce sentiment peut avoir des conséquences néfastes sur ses comportements et sur son développement, à moyen et long terme. d’où l’importance de ne pas banaliser le sujet et de bien accompagner l’enfant victime de harcèlement.

Les conséquences immédiates du harcèlement sur l’enfant victime

En premier lieu, il développe une vigilance qui mobilise toute son énergie. Il est aux aguets, se méfie, il est donc moins attentif et moins réceptif aux apprentissages.

En second lieu, l’enfant harcelé peut développer une forme d’inhibition. Il se met en retrait, joue seul, ou ne joue plus. Les victimes peuvent souffrir de divers symptômes, tels que vomissements, évanouissements, maux de tête, de ventre.
La peur du harcèlement peut ainsi provoquer un absentéisme répété, pour cause somatique, menaçant la réussite scolaire.

D’autres enfants peuvent devenir agressifs et dangereux, souvent vis-à-vis d’eux-mêmes, le recours à la violence étant utilisé comme moyen de défense ou comme moyen d’expression de la souffrance. 

A la maison, il peut développer un comportement révélateur du stress qu’il subit : il dort mal, mange moins, il est triste, irritable, se renferme sur lui.

Ces signes sont autant d’alertes pour les parents.

Les conséquences à plus long terme du harcèlement sur la construction de la personnalité

A plus long terme, le harcèlement subi peut conduire à un isolement relationnel.
Malmené par ses pairs, mal protégé par les adultes dont il n’ose parfois pas solliciter l’aide, l’enfant se referme sur lui-même et passe sa détresse sous silence. Il peut également favoriser le développement d’un sentiment de honte, de perte d’estime de soi et de culpabilité.

A moyen ou long terme, il peut développer des tendances dépressives, voire suicidaires.

L’idée n’est pas ici de faire peur, mais de sensibiliser les parents aux conséquences possibles du harcèlement sur la construction de la personnalité de l’enfant et à la nécessité de ne pas banaliser ce type de phénomène, parmi les plus lourds, après la maltraitance familiale, en terme de conséquences possibles.

Comment accompagner ?

Les parents premier rempart

S’il est vraiment sous l’emprise des harceleurs, il est possible que l’enfant n’en parle pas spontanément ou qu’il nie, si la question est posée trop directement.
Il est cependant possible d’aborder le sujet de manière à ne pas impliquer son enfant directement en discutant du harcèlement, de manière indirecte et pédagogique.
« Je sais que dans certaines écoles, il y a des cas de harcèlement… Je me demandais si dans ton école, c’était la même chose et s’il y avait des enfants qui embêtent les autres ou s’ils t’embêtent toi parfois ?  »
L’enfant doit comprendre, dans le cadre de cette discussion, qu’il peut compter sur ses parents et que dans un tel cas, ils seraient présents pour l’aider, le soutenir, et faire les démarches nécessaires pour que ce harcèlement s’arrête. La conviction des parents sur leur propre pouvoir et sur celui des adultes à l’école doit être être communicative, pour le rassurer et lui donner le courage de retourner à l‘école après sa révélation.

Un numéro vert Non au Harcèlement (le 3020) a été mis en place afin de soutenir les victimes ou les parents d’enfants harcelés. Gratuit et ouvert du lundi au vendredi de 9h à 18h (sauf les jours fériés), il permet d’apporter des conseils et une véritable prise en charge en cas de harcèlement. 

L’importance de la confiance en soi

Tous les enfants ne sont pas égaux. Par exemple, un enfant harcelé qui s’exprime bien, qui est valorisé par ses parents, qui a confiance en lui et se sent sécurisé, parviendra mieux à se défendre face à ses agresseurs qu’un enfant qui doute de lui-même ou qui aura subi d’autres déstabilisations antérieures (maladie, déménagements, …).

Ce dernier conclura alors que ses agresseurs « ont raison », et qu’il l’a « sûrement mérité ». Tandis que le premier, qui se sent soutenu et sûr de lui, pensera que ce sont les harceleurs qui se trompent.

Le rôle des parents est ici primordial car par, leur accompagnement antérieur ils auront déjà donné des armes à leur enfant pour mieux résister, et, par un discours approprié visant à entretenir cette confiance en soi, ils vont l’aider à se refortifier face à l’agresseur.

Emmanuelle Piquet a rédigé un ouvrage très pertinent à destination des parents pour leur permettre d’accompagner leur enfant victime de harcèlement.

Te laisse pas faire - Emmanuelle Piquet - Thérapie par le jeu

http://www.mollat.com/livres/emmanuelle-piquet-laisse-pas-faire-aider-son-enfant-face-harcelement-ecole-9782228911528.html

La nécessité d’une psychothérapie pour reconstruire l’estime de soi

Dans certains cas, une thérapie de soutien sera nécessaire pour aider l’enfant à reconstruire l’estime de soi et à reprendre confiance en lui.

La première étape de la thérapie sera axée sur l’expression, l’extériorisation du problème. Le psychothérapeute veillera à permettre à l’enfant de tirer un soulagement de cette formulation, qui sera plus développée que l’exposé du problème qu’il aura pu ou déjà dû effectuer auprès des adultes. Un travail sur les émotions, les ressentis pourra se déployer à cette occasion.

Dans une seconde phase, en fonction de l’état antérieur de l’estime de soi de l’enfant et de l’ampleur de l’attaque qu’il a subie, le thérapeute s’attachera à rendre plus positif le regard que l’enfant porte sur lui-même. Ceci passe par un travail d’inventaire, de remémoration, d’expérimentation de situations et sentiments.

Le jeu thérapeutique peut être un excellent support de travail, autant sur la première phase que sur la seconde.