Céline Alvarez Les lois naturelles de l’enfant

Le livre de Céline Alvarez, paru aux éditions Les Arènes en septembre 2016, intitulé « Les lois naturelles de l’enfant« , expose avec clarté et pédagogie les principes éducatifs qui permettent aux enfants d’apprendre avec bonheur et de se développer de manière équilibrée et saine.

En effet, inspirée notamment par les méthodes éducatives de Maria Montessori, et en se basant sur les acquis récents des neurosciences cognitives, elle a organisé un mode de vie et d’interactions dans sa classe de maternelle qui remettent profondément en cause les méthodes et mode de pensée inscrits dans une forme de tradition pédagogique. Elle ébranle également certaines représentations sur le développement de l’enfant.

Les conditions de l’apprentissage naturel

En premier lieu, concernant les méthodes d’apprentissage, en s’appuyant sur les travaux de neuroscientifiques (lire l’article neurosciences et apprentissage sur ce blog), elle insiste sur la question de la motivation, sur la nécessaire curiosité qui sert de moteur à la découverte et qui stimule également la mémorisation. En effet un enfant qui n’a pas envie, à qui on impose une méthode ou un thème, sans stimuler son désir, son envie de découvrir ne retient pas spontanément et n’aura pas le goût de répéter cet apprentissage.

Pour bien apprendre, l’enfant doit également être actif, impliqué et ne pas uniquement être mis en position passive de réception d’un message ou d’une leçon. C’est par le mécanisme de l’essai/erreur qu’il va comprendre, apprendre et développer le mécanisme d’auto-correction qui fait progresser.

Le soutien, la guidance de l’autre dans ce processus d’apprentissage par l’expérience sont indispensables, mais le professeur n’est pas le seul à pouvoir prodiguer ce soutien. Les camarades de classe peuvent remplir ce rôle, sous réserve que le mélange des âges soit organisé afin que les petits apprennent des plus grands, de manière naturelle.

Le défaut majeur de notre système éducatif réside dans la relation de dépendance de l’enfant envers l’adulte qui s’accentue d’années en années alors même que le processus inverse devrait pouvoir naturellement se développer. L’enfant est rapidement formaté à solliciter le regard et la validation de l‘enseignant, comme récompense ou validation, ce qui atrophie son sens de l’auto-évaluation, de l’estime de soi et de l’autonomie.

Et ceci a des conséquence au delà de la question éducative, sur la personnalité de l’enfant et de l’adulte à venir.

Les enjeux sur le développement psychologique de l’enfant et sur le mode relationnel sont majeurs

L’expérience a été menée dans une école maternelle mais Céline Alvarez en tire des enseignements qui dépassent largement la question de la pédagogie éducative.

Elle insiste sur l’importance de l’environnement affectif offert au sein de la classe, soulignant le rôle majeur de l’enseignant qui doit pouvoir instaurer une ambiance chaleureuse, empathique et compréhensive. Cette bienveillance favorise la sécrétion d’ocytocine, appelée hormone du bonheur, qui procure un sentiment de confiance, d’attachement et de bien-être qui irrigue ainsi le cerveau des enfants.

Céline Alvarez rappelle, et c’est essentiel en ces temps brutaux et désenchantés, que ces sentiments alimentent les tendances sociales innées dont sont dotés les enfants : l’élan altruiste, l’entraide naturelle, la puissance du système de récompense interne (alimenté par l’auto-évaluation). La séparation entre les âges et le mode d’enseignement descendant et formaté sur l’attente de la reconnaissance externe entravent ces tendances naturelles et jouent contre le phénomène de «reliance», défini comme cette capacité à être en relation à l’autre de manière empathique, confiante et bienveillante.

Par ailleurs, l’autonomie favorisée dans les apprentissages contribue au développement des compétences manuelles et du contrôle inhibiteur qui permet l’autorégulation et la temporisation, soutien au développement de relations sociales positives et au sentiment de respect de l’autre.

Elle insiste enfin sur l’apprentissage nécessaire du langage des émotions afin de permettre à tout enfant de les décoder, de les exprimer et de les réguler.

Ainsi, ce qui se passe en classe dépasse largement la question de l’apprentissage et des connaissances acquises au sein de l’école. Ce qui s’y joue a des conséquences fondamentales sur le développement psychologique des enfants et sur leurs comportements sociaux.

Ce livre remet ainsi au centre du débat ces questions de société et laisse entrevoir une autre façon de penser, d’éduquer et de vivre ensemble.

Acheter le livre : https://www.mollat.com/livres/1569249/celine-alvarez-les-lois-naturelles-de-l-enfant