Neurosciences et apprentissage

Le rôle du jeu dans les apprentissages scolaires : l’éclairage des neurosciences

Les expériences menées par Maria Montessori ou les écoles Freinet, Steiner ont prouvé, depuis un siècle déjà, l’efficacité du jeu dans l’apprentissage des savoirs scolaires. Une récente expérience menée par Céline Alvarez à Genevilliers a repris ses principes et a pu dans une classe de maternelle mettre en action un certain nombre de principes de base en matière d’éducation. Les neurosciences permettent aujourd’hui, par leurs recherches et expériences, de baser et expliquer scientifiquement.

Voici un article qui résume les récentes découvertes des neurosciences sur ce que sont les piliers de l’apprentissage.

Ce qu’il faut dire en premier, c’est que le cerveau d’un bébé est déjà très riche dès sa naissance. Des milliards de neurones sont déjà disponibles et des aptitudes sont déjà présentes telles que par exemple la numération. Sous une forme intuitive le bébé peut déjà différencier par exemple les quantités. Sur ces bases pré-existantes, il va pouvoir développer ses apprentissages par le phénomène dit de « plasticité cérébrale ».

Le premier principe socle favorisant l’apprentissage est l’attention.

Le cerveau est doté d’un système de filtre, que Freud avait déjà mis en évidence dans sa représentation des instances psychiques sous le terme pare-exitation. Ce filtre permet au cerveau de sélectionner les informations et d’en moduler le traitement.

Il faut donc en premier lieu attirer l’attention de l’enfant. Sachant que le cerveau ne peut pas être attentif et mobilisé de manière simultanée sur plusieurs éléments, il faut également orienter l’attention vers un point précis. Ainsi, des supports multi-thématiques ou visuellement dispersant sont à éviter dans un contexte d’apprentissage.

Le second principe est celui de l’engagement actif.

Il passe par l’expérience et par la manipulation manuelle, concrète des éléments d’apprentissage. Ainsi le calcul avec bâtonnets, allumettes ou piécettes utilise une pédagogie adaptée. Pour la lecture également le déchiffrage sensoriel des lettres en permettant à l’enfant de suivre du doigt la forme de la lettre favorise la construction de la représentation de la forme de la lettre en mobilisant une autre zone du cerveau que celle qui est spontanément sollicitée pour la reconnaissance visuelle. Cette zone de reconnaissance visuelle est structurée pour reconnaître les visages et fonctionne par symétrie. Cette aptitude native explique pourquoi les enfants éprouvent des difficultés à distinguer les lettres miroirs (le b et le d, le p et le q). Lorsque l’enfant exerce d’autres aptitudes, de nouvelles connexions se structurent et viennent étayer les premières.

Le troisième principe est celui du retour d’information.

Le cerveau est une sorte de machine à anticiper et à corriger les anticipations erronées. Le retour mentionnant l’erreur ou le succès est donc primordial pour valider par itération les apprentissages. Ce qui veut dire que l’erreur est utile et doit donc être gérée sans stress. Dans l’expérience menée à Gennevilliers, Céline Alvarez insiste sur l’intérêt de permettre aux enfants de co-apprendre c’est à dire de s’entraider dans les apprentissages, sur un mode participatif et bienveillant, ce qui permet à l’enfant de moins rechercher l’avis et l’approbation de l’adulte. Il apprend très vite ainsi à s’autoévaluer en relevant lui-même les indices de succès/erreurs.

Enfin, le quatrième socle est celui de la répétition.

Pendant la phase d’apprentissage, le cerveau mobilise une importante énergie pour se concentrer, décoder, intégrer de nouvelles données, les tester etc… Ceci consomme aussi du temps. Afin de raccourcir le traitement, le cerveau passe ensuite à un mode automatique, inconscient qui lui permet libérer de la disponibilité pour d’autres activités. Un bon exemple est celui de la lecture où l’apprentissage est progressif, hésitant et passe ensuite à un stade automatisé et inconscient, qui permet notamment de libérer de la capacité psychique pour comprendre le sens du texte. Donc l’apprentissage doit permettre l’exercice, la répétition, l’entrainement.

On voit bien à travers ces quatre points à quel point le jeu peut être adapté pour favoriser les apprentissages puisqu’il cumule à lu seul l’ensemble de ces caractéristiques : attention, implication, retour d’information et répétition.

Je rajouterais également la notion de plaisir dans le jeu qui favorise bien évidemment l’ensemble des ces caractéristiques.

Pour aller plus loin,

– sur l’expérience menée à Gennevilliers par Céline Alvarez : https://lamaternelledesenfants.wordpress.com/

– sur les neurosciences et l’apprentissage Stanilas Dehaene, professeur au Collège de France : www.paristechreview.com/2013/11/07/apprentissageneurosciences/

mon article sur les fonctions du jeu

Cécile BAHIER